samedi 24 janvier 2015

Du champignon ... au "Poireau"

Ce 17 janvier 2015, à l'occasion de la cérémonie des vœux de la commune de Lovagny, M. Henri CARELLI, maire, avait accepté que soient honorés M. Daniel AUDOUIT et Mme Christiane AUDOUIT.

Outre M. le maire et son Conseil municipal, étaient présents M. Christian JEANTET, Conseiller général, M. François DAVIET, Président de la Communauté de Communes Fier et Usses et M. Bernard ACCOYER, Député.

Après le rappel de la carrière des récipiendaires :
 

M. le Député leur remit la médaille de Chevalier de l'Ordre du Mérite Agricole. M. Henri CARELLI leur offrit la médaille de la commune.



Cérémonie de remise des insignes de l’Ordre du Mérite Agricole
À M. et Mme AUDOUIT
Lovagny le 17 janvier 2015

Une vie et une carrière au service du champignon

M. Daniel AUDOUIT, vous avez commencé votre parcours « dans le champignon » en 1972 à Montoire-sur-le-Loir au sein des établissements GUILBEAU. Vous arrivez en Haute-Savoie en juillet 1974 dans l’entreprise LIGERET comme responsable du compostage, afin d’obtenir le statut de travailleur frontalier pour aller travailler en Suisse. Après six mois d’activité, vous partez donc travailler en Suisse chez M. Parmentier, champignonniste.
Toutefois, six mois plus tard, vous vous installez à Chambéry avec Melle LIGERET qui deviendra Mme AUDOUIT et prenez la direction du site de Chambéry ouvert par votre beau-père, M. LIGERET. L’activité de ce site durera un an et demi et devra être interrompue pour des raisons de sécurité, les galeries étant devenues dangereuses. Vous revenez donc à Annecy au sein des établissements LIGERET comme directeur technique jusqu’à leur liquidation en 2000.

Mme Christiane AUDOUIT, vous avez toujours travaillé dans le monde du champignon depuis votre mariage en 1975, la plupart du temps de façon bénévole. Vous avez ainsi assuré de nombreuses fonctions allant de la récolte au nettoyage des caves, notamment à Chambéry, en passant par les livraisons. Vous avez également assuré pendant de nombreuses années la comptabilité de l’entreprise LIGERET. Depuis 1995, vous avez collaboré à plein temps au fonctionnement de l’entreprise.

Une production artisanale
La concurrence des productions intensives, en serres climatisées, nuit fortement à votre entreprise.
N’étant plus que deux pour assurer toutes les étapes de la culture à la commercialisation, vous avez dans un premier temps rationalisé votre procédé en supprimant toute la préparation du fumier.
Malgré une application méticuleuse, des soins constants et une longue expérience, le travail des champignonnistes ne suffit malheureusement pas à garantir une production régulière. La nature conserve ses mystères : trop de vent, l’air s’assèche et les champignons ne sortent pas ; trop de pluie, l’hygrométrie des caves augmente, et les moisissures apparaissent ; trop de fraîcheur, et la pousse est inhibée, etc. Très fragiles, les champignons sont cueillis un par un et placés directement dans des barquettes de 250 ou de 500 g.
A la fin de la fructification, vous deviez évacuer le compost des galeries, et tout désinfecter soigneusement avant de laisser la cave au repos deux semaines puis de recommencer.
Diversification appréciée des gourmets annéciens, le pleurote (cousin des champignons de Paris) montre au chaland sa coquille gris velouté ou beige fumé. Plus frugal, il pousse en touffes sur de la paille et nécessite l’alternance jour / nuit pour croître. Autre innovation de  votre part par rapport aux cultures historiques des Etablissements LIGERET, le shii-také, ou lentin du chêne, très prisé des clients soucieux de diététique ou gourmands de cuisine asiatique, passe pour receler des vertus anti-cancérogènes.
Vous avez travaillé sept jours sur sept, du matin au soir, sans vacances ni jours fériés, pour permettre à une activité artisanale de persister et fournir des produits de très haute qualité à une clientèle de professionnels (restaurants) ou de particuliers exigeants, à des prix qui ne laissent aucune marge de manœuvre. Sous terre chaque jour de l’année, éclairés par vos lampes frontales, vous avez perpétué un savoir-faire en voie d’extinction puisque vous n’étiez plus qu’une poignée de champignonnistes dans toute la France à exercer le métier selon les méthodes traditionnelles, sans serres climatisées.
Votre production trouvait sa place sur les marchés d’Annecy, à défaut de circuits de distribution adaptés à votre modeste échelle.

Les visites du site
A partir de 2009, l’idée ayant germé de valoriser votre travail et de faire connaître votre activité hors du commun, votre fils Franck AUDOUIT (professeur de sciences) organise sur le site-même des galeries des visites régulières destinées au grand public : chaque mercredi après-midi en juillet et août ou chaque 1er samedi du mois le matin d’avril à novembre, avec le soutien du Syndicat d’initiative de l’Albanais. Pour ce faire, Franck AUDOUIT a réalisé un dépliant reprenant des éléments de géologie locale, l’historique de l’entreprise et la présentation des trois cultures pratiquées sur place. Des groupes, y compris des classes entières d’élèves de niveau élémentaire, seront accueillis également sur rendez-vous tant vous étiez soucieux de montrer votre production agricole méconnue – et quand bien même le travail dans les galeries ne s’effectue pas tout seul pendant ce temps de communication.
Cette initiative remporte un succès croissant, le nombre de 200 visiteurs a été atteint sans difficulté entre juillet et août 2012.
Toutefois, l’âge avançant, vous ne reniez pas votre passion pour les psalliotes mais pensez à prendre votre retraite. Ce fut chose faite en décembre 2013 mais non sans un pincement au cœur car, désormais, la profession n’est plus représentée dans le département car aucun successeur ne s’est annoncé.
C’est pour toutes ces raisons que le Ministre de l’Agriculture vous a décerné le grade de Chevalier du Mérite Agricole au titre de la promotion de janvier 2014.